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[SATSUMA] Une histoire de samouraï à la sauce gekiga
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herbv
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Inscrit le : 28 Août 2002
Localisation : Yvelines

Message Posté le : 11/12/04 17:49    Sujet du message: [SATSUMA] Une histoire de samouraï à la sauce gekiga Répondre en citant


Satsuma - L'honneur de ses samouraïs

Un nouveau manga sur les samouraï vient de sortir grâce à Akata et aux éditions Delcourt et il se place d'entrée parmi les meilleurs, si ce n'est le meilleur, tout simplement.

De part son traitement du sujet, on est loin de Kenshin le vagabond ou de Samourai Deeper Kyo pour être plus proche de Lone Wolf & Cub : grande rigueur historique, dessin réaliste et sans fioritures, absence totale de trames, il se détache de ce dernier par une histoire plus ancrée dans une certaine réalité économique et sociale du Japon à l'époque féodale. On sent bien que l'auteur, Hiroshi Hirata, est issu du monde des gekiga. Mais l'histoire reste extrêmement plaisante à lire grâce à de nombreuses situations de combats et d'action.

Au milieu du XVIIIème siècle les samouraïs du fief de Satsuma mènent une existence rude et laborieuse. Ils travaillent la terre pour gagner leur maigre pitance. Ils sont aussi les souffre-douleurs des samouraïs des classes supérieures. Las des humilations, ils se rebellent contre leurs oppresseurs. Sakon Shiba, un samouraï charpentier, mène l'insurrection. Coupable de sédition, il est condamné à mort. Mais lors d'une cruelle chasse à l'homme, il gagne son acquittement, battant en duel un des samouraïs, Gondô. Jûzaburô, le fils de Gondô, décide de venger la mort de son père et de réparer l'offense.

"Satsuma, l'honneur de ses samouraïs" est fondé sur un fait historique. Fin de l'année 1753, la famille Tokugawa règne sur le Japon. Le Shogun Tokugawa n'aime pas le fief de Satsuma qu'il juge agité et dangereux. Il cherche donc depuis longtemps à l'affaiblir. Comme les innondations à Owari ne cessent de poser problème, Tokugawa oblige Satsuma à construire des digues.
Hiarata a choisi de faire un portrait réaliste de la société des samouraïs de l'époque. "Satsuma, l'honneur de ses samouraïs" est le témoignage réaliste des humiliations et des déshonneurs subis par tout un clan. Dans la veine de "Lone Wolf and Cub" Satsuma ne s'incarne pourtant pas dans le domaine de la croyance mais celui de la réalité humaine. Ses héros prennent vie sous sa plume, leurs valeurs ont réellement été éprouvées, ce qui invite le lecteur à poser un autre regard sur cette oeuvre forte.

(Présentation tirée du catalogue manga 2004-2005 des éditions Delcourt)

Plusieurs aspects m'ont particulièrement plu dans ce premier volume et je vous les exposerais dans un prochain post. En attendant, si vous aimez Lone Wolf & Cub, vous adorerez Satsuma.
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Dernière édition : herbv le 12/12/04 14:24; Edité 1 fois
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herbv
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Inscrit le : 28 Août 2002
Localisation : Yvelines

Message Posté le : 11/12/04 18:23    Sujet du message: Satsuma Répondre en citant

Voici un petit jeu des points forts et des points faibles de ce volume 1 :

Points forts :
- Grande rigueur historique permettant dâ??apprendre à mieux connaître cette époque du Japon et une facette de sa société. C'est extrêmement intéressant.
- Personnages charismatiques comme Sakon Shiba ou révoltés comme Jûzaburô.
- Description réaliste de la société et notamment des relations entres castes sans oublier les comportements individuels.
- Combats réalistes : ça tue vite et salement.
- Lâ??auteur est ambitieux dans sa narration : lâ??histoire nâ??est pas linéaire, il y a de fréquents flash-back, de nombreuses digressions historiques et explicatives, plusieurs unités de lieu, au moins deux personnages principaux. Et ce nâ??est que le volume 1.
- Dessin réaliste tout en restant très dynamique et même parfois contemplatif. Et grande maîtrise de la morphologie, ce qui est important pour ce type de manga.
- Excellente version française, très bien adaptée aussi bien au niveau du texte que graphiquement. Excellents bonus avec un mot de lâ??auteur écrit spécialement pour la version française, une biographie assez complète et de nombreuses clés de compréhension très bien faites.

Points faibles :
- Dessin daté (série commencée à la fin des années 70) notamment celui des visages, ce qui instaure une certaine confusion dans les personnages. Un peu comme dans Lone Wolf & Cub, les différents personnages ont tendance à se ressembler et, parfois, il est difficile de les distinguer les uns des autres.
- Absence totale de trame, ce qui peut rebuter le lecteur, ce qui nâ??empêche pas le dessin dâ??être superbe à certains moments. Mais cela peut être aussi considéré comme un point fort, ce qui est mon cas.
- Narration parfois un peu confuse, on peut être un peu perdu sur certaines pages.

Prochain message : Quelques exemples du dessin de Hiroshi Hirata dans Satsuma.

Message à venir : Satsuma, un société patriarcale poussée à l'extrême grâce à l'honneur.
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Adrien de Bats
M. Mangaverse


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Message Posté le : 11/12/04 18:42    Sujet du message: Répondre en citant

herbv, au joli chapeau, a écrit:
Prochain message : Quelques exemples du dessin de Hiroshi Hirata dans Satsuma.

Message à venir : Satsuma, un société patriarcale poussée à l'extrême grâce à l'honneur.


Toi aussi tu as cédé aux sirènes du topic auto-alimenté par son créateur? (Plus sérieusement, ça a l'air très bien)
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Dolph lundgren
Mangaversien·ne


Inscrit le : 28 Jan 2004

Message Posté le : 11/12/04 18:57    Sujet du message: Répondre en citant

Je suis entièrement d'accord avec toi herbv. Satsuma, après lecture du premier tome, est un bon manga. La suite laisse présager quelque chose de vraiment interessant. Affaire à suivre.
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herbv
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Inscrit le : 28 Août 2002
Localisation : Yvelines

Message Posté le : 11/12/04 18:59    Sujet du message: Oui Répondre en citant

Oui, Adrien de Bats. A part que j'espère qu'il n'y aura pas que moi pour discuter de cette série Sourire. Et découper mes messages permet de ne pas tout perdre en cas de problème (car il y a un peu de boulot, il ne faut pas croire), de créer une certaine attente chez le lecteur en utilisant quelques recettes de type feuilletonnesque. Tout est bon pour "vendre" Satsuma Très content.

Voici donc quelques images tirées du catalogue manga 2004-2005 des éditions Delcourt :
(cliquez sur l'image pour l'avoir en plus grande)





Et regardez moi ça, si ce n'est pas du beau dessin :

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Dolph lundgren
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Message Posté le : 11/12/04 19:02    Sujet du message: Répondre en citant

C'est clair que graphiquement c'est vraiment beau. On a du mal à croire que cette série ait 27 piges au compteur.
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herbv
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Inscrit le : 28 Août 2002
Localisation : Yvelines

Message Posté le : 11/12/04 19:04    Sujet du message: Oui Répondre en citant

Faut pas croire, Dolph, il y a 30 ans, les dessinateurs savaient déjà dessiner. Tout n'a pas été inventé dans les années 80-90 Sourire.
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Dolph lundgren
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Inscrit le : 28 Jan 2004

Message Posté le : 11/12/04 19:08    Sujet du message: Re: Oui Répondre en citant

Tiens une phrase que Marie n'aurait pas renié Mort de rire
Je le sais très bien, mais je trouve que ça s'encre très bien dans notre époque, contrairement à certains Tezuka ou Gen d'Hiroshima, qui affichent clairement leurs "rides".
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Den
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Localisation : in translation

Message Posté le : 11/12/04 19:51    Sujet du message: politiquement correct Répondre en citant

Chouette, ton post, Herbv.

Je me demandais si tu pouvais dire deux/trois mots sur l'arrière fond politique du manga. Souvent les mangas à fond historique sont assez clairement à droite (Kenshin) ou à gauche (Kamui-den). Que ressens-tu ?
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herbv
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Message Posté le : 11/12/04 20:30    Sujet du message: Réponses Répondre en citant

Dolph : Je pense que cela vient du fait qu'il s'agit d'un dessin très réaliste. Je trouve que les dessins de type comique ont tendance à plus suivre la mode du moment et à plus mal vieillir.

Den : Je ne sais pas si on peut raisonner en terme de "droite" ou "gauche" pour cette oeuvre, ni même si c'est très pertinent. Surtout qu'en un seul volume, il est un peu tôt pour pouvoir porter un jugement. Mais il s'agit d'un gekiga donc la portée sociale de la série, une certaine dénonciation du pouvoir en place qui profite du système par l'exploitation des castes de samouraïs inférieurs en les maintenant solidement sous sa coupe par le biais de l'honneur (et donc de la honte, son corrolaire, mais j'anticipe sur mon intervention de demain) le positionnerait plutôt à gauche. Et je pense que ce serait une erreur de raisonner ainsi. Ceci dit, tu as raison de poser la question de l'arrière plan politique car il s'agit d'une oeuvre politiquement engagée du fait qu'on est assez loin des images d'épinal sur les samouraïs. Rappelons que si on en croit la biographie donnée en fin de volume, l'auteur a eu des problèmes avec des organisations d'extrême droite révisionnistes qui ont cherché à interdire deux de ses oeuvres. Je vais essayer de développer cet aspect demain.
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Rammstein
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Localisation : Marseille bientôt Paris

Message Posté le : 12/12/04 05:48    Sujet du message: Merci Répondre en citant

BRAVO pour ce post, merci pour ces très bonnes complémentarités et ces très beau dessins.... #Crazy

Moi Fan de manga de Samouraï, je cours l'acheter.... (heu mince il est 04:45 c'est un peu tard Pleure ou Très triste Va falloir attendre lundi.... allez courage... Je vous dirai ce que j'en pense...)
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Mon rêve, c'est de jouer le premier rôle d'un manga adapté au cinéma...
Un sabre !!! il me faut un SABRE ... !!!
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herbv
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Message Posté le : 12/12/04 11:15    Sujet du message: Satsuma Répondre en citant

Satsuma, une société patriarcale poussée à l'extrême grâce à l'honneur - Introduction.

Cette série est un gekiga, cela signifie que le volet social de l'histoire des samouraïs de Satsuma est particulièrement développé, notamment en nous montrant la vie des "mangeurs de patates", les gôshi. A la différence de Lone Wolf & Cub, nous voyons ici des samouraïs placés au plus bas de l'échelle de cette caste de guerrier ainsi que leurs relations houleuses avec le reste de la population, que ce soit les gens du commun (marchands, paysans, ...) ou les samouraïs hiérarchiquement supérieurs comme les jôkashi et les jôshi.

L'existence de ces guerriers-paysans (ce que signifie le terme gôshi) peut être surprenante pour le non initié (même japonais) et c'est pour cela que, tout en nous contant de façon fort vivante l'histoire d'un de ces samouraïs situé en bas de l'échelle, Hiroshi Hirata, l'auteur, introduit de nombreuses digressions à but éducatif. Cela est très réussit car il réussit à ne pas casser le rythme du récit. Mais on peut alors se demander, lorsqu'on voit dans quelle grande misère vivaient ces gôshi, ce qui les empêchaient de se révolter devant leur sort. En effet, tant par leur nombre que leur force (ils étaient armés et entraînés), ils pouvaient représenter un danger pour le pouvoir (au moins local) en face. Deux pistes de réflexions sont proposées dans le premier volume : un entraînement défouloir grâce à l'école de sabre Jigen et le respect de la tradition, de la hiérarchie, et de l'honneur grâce à l'enseignement des préceptes de l'école de Nise.

Si la partie entraînement et enseignement des arts martiaux n'est pas très développée pour l'instant, rendant impossible une réflexion développée sur les principes de l'école de jingen tels qu'ils sont expliqués dans les clés de compréhension (notamment sur le fait de ne pas dégainer son sabre en premier) et leur mise en pratique dans le fief de Satsuma, le mangaka nous livre, par le biais de Jûzaburô, un jeune jôkashi, une féroce critique de l'école de Nise. Et c'est cette critique, par le biais d'une lecture personnelle, que je vais essayer de développer, ce qui commencera par un petit exposé sur la notion de société patriarcale avant de l'appliquer à l'école de Nise.
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herbv
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Message Posté le : 12/12/04 12:52    Sujet du message: Satsuma Répondre en citant

Satsuma, une société patriarcale poussée à l'extrême grâce à l'honneur - Notions.

Une société patriarcale, quâ??est-ce que câ??est ? Câ??est une société qui repose sur une détention du pouvoir par les hommes. On est dans une logique de domination masculine. Mais il ne faut pas penser que tous les hommes détiennent le pouvoir de façon équivalente. Au contraire, il y a une hiérarchie allant des hommes de pouvoir aux hommes sans aucun pouvoir. Par pouvoir, on pensera au pouvoir politique (de décision), économique (la richesse), social (la place dans la société), les trois étant souvent lié mais pas tout le temps, notamment comme nous le montre Satsuma où le pouvoir social des samouraïs, même les plus pauvres, est supérieur à celui des marchands, même les plus riches.

Quelles sont les principales caractéristiques dâ??une société patriarcale ? Tout dâ??abord, le sexisme qui permet dâ??éliminer du pouvoir la moitié de la population humaine (même si les contre-exemples existent en nombre et que la réalité est plus complexe, cela reste assez marginal dans les faits). Le sexisme est un principe de vision et de division du monde social qui repose un principe illusoire mais intériorisé que l'appartenance à un sexe biologique correspond à une appartenance à un genre social à qui il serait rattaché des rôles, des qualités et des défauts "naturels" et spécifiques. Pour simplifier, les hommes seraient évidemment forts (force physique étendue à tous les domaines) donc actifs, responsables, publics et les femmes, plus disciplinées, seraient les seules aptes à s'occuper des enfants et de l'espace domestique et privé. Inutile de dire que dans cette optique, les hommes sont supérieurs aux femmes et sont surtout détenteurs des pouvoirs politique, économique, social et même domestique, grâce à lâ??application du patriarcat à la notion de famille.

En effet, le patriarche est le symbole, lâ??image vivante du pouvoir sexiste : câ??est le chef de famille, le père tout puissant, pouvoir quâ??il exerce sur son épouse (la mère) et ses enfants. Cette notion de famille dominée par lâ??image du père sâ??explique facilement par « l'intérêt individuel de chaque homme à se faire servir à la maison par une femme dévouée et aimante et l'intérêt collectif qu'a la classe dominante à perpétuer la division sociale entre hommes et femmes ». Ce pouvoir domestique repose sur la hiérarchie et le respect de cette hiérarchie : le patriarche puis lâ??aîné (futur patriarche), la mère et les enfants. Encore quâ??il sâ??agira dâ??enlever les enfants mâles relativement tôt à lâ??influence de la mère afin quâ??elle ne les pervertissent pas. Car très rapidement, il sâ??agit dâ??avoir un comportement conforme aux normes sociétales. Et ce comportement se concrétise dans la notion dâ??honneur qui est un des principaux outils de la domination masculine. Rien nâ??est plus important que lâ??honneur de la famille (y compris sous sa forme la plus élargie).

Lâ??honneur est la dignité morale des individus, leur fierté. Pour certains, câ??est leur bien le plus précieux et tout doit être fait pour le préserver. La morale étant une construction sociale, il sâ??agit donc de respecter au mieux les droits et devoirs que la société accorde. Et câ??est le cas des samouraïs, notamment ceux de Satsuma. Il faut savoir que derrière lâ??honneur se trouve la honte et la honte est un des plus puissants mécanismes de domination des esprits, de maintient de lâ??ordre social. La honte, câ??est publiquement le déshonneur, la perte de son honneur. Mais elle est aussi intériorisée par chacun du fait de lâ??éducation reçue, ce qui conduit à sâ??imposer un certain comportement en société. Elle empêche de sâ??écarter du droit chemin car elle est légitimée, acceptée par la majeure partie de la société. Câ??est quâ??il est important de ne pas connaître la honte, le déshonneur, surtout quand on est samouraï et encore plus quand on est un gôshi et que lâ??honneur est la seule chose, le seul pouvoir que lâ??on ait.

Mais comment toutes ces notions se retrouvent-elles dans le volume 1 de Satsuma, l'honneur de ses samouraïs ? Cela fera lâ??objet dâ??un prochain message.
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herbv
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Message Posté le : 12/12/04 13:37    Sujet du message: Satsuma Répondre en citant

Satsuma, une société patriarcale poussée à l'extrême grâce à l'honneur - Développement (1).

Avertissement au lecteur : Dans cette partie, il va être donné un certain nombre dâ??éléments sur le contenu du volume 1 de la série mais jâ??estime quâ??en aucun cas cela peut nuire au plaisir de lecture par la suite. Lâ??histoire est suffisamment prenante et rythmée pour ne pas pâtir dâ??une discussion sur la nature de lâ??honneur et de la structure de la société féodale de Satsuma.

Une des grandes révélations du début de la série est lâ??existence de samouraïs si pauvres quâ??ils sont contraints dâ??exercer des métiers dâ??appoints. On apprend ainsi que leurs émoluments de guerrier ne permettaient pas de faire vivre leur famille, dâ??où la nécessité dâ??exercer les métiers dâ??appoints parfois for surprenants comme celui de fabriquant ou de réparateur dâ??ombrelles, fabriquant de peignes ou de sandales, laqueurs. Qui pourraient imaginer que ces fiers combattants pourraient avoir des occupations si délicates ? Tous nâ??étaient pas bûcherons, carriers, tailleur de pierre, forgerons, autant de métiers réservés aux gôshi. Il y avait aussi des vendeurs et même des ouvriers agricoles. Tout était bon pour les "mangeurs de patates", il fallait bien survivre. De plus, si un métier dâ??appoint venait à être rentable et permettait des bénéfices, ceux-ci étaient récupérés par le fief et donc profitaient aux samouraïs placés plus haut dans la hiérarchie de la caste (les jôkashi mais surtout les jôshi), leur évitant la déchéance de devenir des gôshi. Dâ??ailleurs, certains jôkashi préféraient vivre dans une misère noire plutôt que de travailler.

On peut alors se demander ce qui pouvait permettre à un tel système de rester en place, ce que pouvait bien signifier dâ??être un samouraï si pauvre quâ??il ne pouvait même pas se nourrir ainsi que sa famille. Dâ??ailleurs, Sakon Shiba se pose de telles questions et les pose publiquement lors du hiemontori du début de lâ??histoire. Le mangaka nous donne alors un premier élément de réponse : Lâ??honneur. A la question « Ã?a veut dire quoi, être un samouraï ? Câ??est lâ??honneur ? Même un samouraï a besoin de manger ! », il répond en deux temps : tout dâ??abord par lâ??honneur qui est profondément ancré dans leur cÅ?ur (ce quâ??il développera par la suite lors de la révolte de Jûzaburô) et par la hiérarchie qui place les samouraïs, même de rang inférieurs au dessus de la grande masse de la population civile, y compris les plus riches marchands qui doivent respect et politesse aux samouraïs même (et surtout) quand ceux-ci exercent leur métier dâ??appoint et sont sollicités pour cela. Pour les gôshi lâ??honneur est leur seul bien, celui qui leur permet de garder leur place dans la société de Satsuma et donc dâ??avoir un certain pouvoir, celui de vie et de mort sur la population civile. Ce pouvoir repose aussi sur la hiérarchie, ce qui place les jôkashi et surtout les jôshi en position supérieure, lâ??honneur leur donnant pouvoir de vie et de mort sur les civils mais aussi sur les gôshi. Lâ??honneur les tenaient ainsi car il leur interdisait tout comportement public qui pourrait être honteux, ce qui pourrait jusquâ??à leur faire perdre leur position et perdre ainsi le pouvoir qu'ils possédaient.

Mais comment les samouraïs de Satsuma pouvaient quand même supporter une telle misère et dâ??où pouvait bien venir une notion de lâ??honneur aussi exacerbée ? Les dirigeants du fief avaient deux instruments pour cela : lâ??école dâ??escrime de Jigen et les préceptes de lâ??école de Nise. Et câ??est que lâ??on verra dans le prochain message.
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herbv
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Message Posté le : 12/12/04 15:41    Sujet du message: Satsuma Répondre en citant

Satsuma, une société patriarcale poussée à l'extrême grâce à l'honneur - Développement (2).

Lâ??auteur développe un certain point de vue sur lâ??école dâ??escrime de Jigen. Il ne sâ??arrête quâ??à un seul de ses aspects : celui de la persévérance, de lâ??endurance. Et ceci se concrétisait dans un exercice qui consistait, chaque matin, à frapper 3000 fois un pieu en bois avec un bâton tout en poussant des hurlements. Cela avait pour effet de diriger la colère des samouraïs de cette école sur autre chose que leurs maîtres et de se défouler pour vider leur esprit. Ainsi la hiérarchie pouvait contenir sa base et éviter des soulèvements. Certes, cela avait des limites comme le montre lâ??histoire de Sakon Shiba mais était globalement redoutable dâ??efficacité : lâ??action empêche de penser, câ??est bien connu.

Mais le moment le plus fort de ce volume est la critique de la société des samouraïs avec la remise en cause de lâ??application des préceptes de lâ??école de Nise. Le mangaka la fait par le biais de Jûzaburô Gondô, un jôkashi dont le père a été tué par Sakon Shiba lors dâ??un duel. La première réaction du jeune samouraï est de venger la mort de son père mais il en est empêché par les autres membres de sa famille car cela nuirait à lâ??honneur du clan, parole ayant été donnée que Sakon Shiba repartirait libre en cas de victoire. Mais câ??est aussi lâ??honneur du clan qui a tué la femme que le jeune homme aimait et avait promis dâ??épouser, vraisemblablement assassinée par ce même père maintenant défunt. Et câ??est dans une diatribe enflammée Jûzaburô va critiquer ce quâ??est devenu la caste des samouraïs de Satsuma et se révolter contre son enseignement et sa famille.

Cet enseignement inculque un respect absolu pour la hiérarchie (« la hiérarchie entre samouraïs doit être scrupuleusement respectée »), lâ??honneur (un samouraï ne doit pas mentir, il ne doit pas médire de ses camarades), le respect des traditions, la loyauté (envers ses supérieurs), le respect (envers ses parents). Tous ces éléments de lâ??école de Nise sont constitutifs dâ??une société patriarcale poussée à lâ??extrême reposant sur un sexisme exacerbé : les femmes sont impures, elles sont des êtres faibles, lâ??exacte opposé de lâ??esprit des samouraïs. Les fréquenter est donc quelque chose dâ??inacceptable, en période de formation, cela va sans dire, car il sâ??agira de fonder une famille par la suite. Lâ??esprit critique y trouvera de nombreuses contradictions mais cette formation commençait dès lâ??âge de 6 ans et permettait un conditionnement développé au point de refuser la moindre discussion sur une application aussi radicale de cet lâ??enseignement, de ne supporter la moindre critique ou la moindre remise en question. Car, comme le montre le scandale provoqué par Jûzaburô Gondô, refuser dâ??appliquer aveuglément et stupidement ses préceptes est punissable de mort ou au moins du bannissement de lâ??école, donc de la société. Dans le volume 1, on ne voit pas les conséquences du déshonneur qui va immanquablement frapper Jûzaburô mais on peut l'imaginer sans trop de mal : il risque fort de devenir un gôshi et périr sous les coups de ses anciens pairs, les jôkashi. A moins qu'un évènement d'importance survienne dans le fief et lui permettant de sauver sa position.

Derrière cette critique de lâ??enseignement de lâ??école de Nise tel que pratiqué dans le fief de Satsuma, on voit se pointer une critique plus générale du bushido, la voie du guerrier, et un de ses principaux ouvrages, le hagakure, en montrant la face obscure de cet enseignement qui permettait de consolider le pouvoir des dirigeants. Il serait possible de développer plus dans ce sens en multipliant les exemples tirés du volume 1 mais cela n'apporterait rien de plus à la démonstration. Ceci dit, je rassure l'éventuel lecteur de Satsuma, l'honneur de ses samouraïs, la série est aussi une excellente histoire de samouraïs pleine d'action et de combats et plusieurs lectures de la séries sont possibles.
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